Agences de voyage : un fonds de garantie pour soutenir le secteur du tourisme

 

En France, toutes les agences de voyage ont l’obligation de souscrire une garantie financière auprès d’un organisme ou d’un assureur privé. Cette garantie a pour but de soutenir les clients, en cas d’annulation de voyage, lorsque l’agence de voyage n’a plus la capacité de les rembourser. Depuis deux ans, du fait de la pandémie de Covid-19, le secteur du tourisme a été fortement ébranlé.

 

La multiplication des annulations de voyages et de séjours ainsi que le remboursement des avances ont conduit nombre d’agences de voyage au bord de la faillite ou à la liquidation, ne pouvant plus honorer leurs engagements financiers vis-à-vis de leurs clients.

 

Pour soutenir les organismes de garantie financière et les assureurs des agences de voyage, l’Etat a créé, depuis le 1er janvier 2022, un fonds de garantie des opérateurs de voyages et de séjours par un décret du 30 décembre 2021.

 

Ce fonds fonctionne comme un service de réassurance publique (c’est-à-dire une assurance pour sociétés d’assurance, garantie par l’Etat). Il couvre les organismes de garantie des agences de voyage pour les nombreux séjours ou voyages annulés à cause de la pandémie. Géré par la Caisse centrale de réassurance (CCR), il pourra intervenir jusqu’à 1,5 milliards d’euros de pertes. Il sera financé par des dotations de l’Etat et les primes versées par les organismes de garantie financière. Ceux-ci ont jusqu’au 31 décembre 2023 pour signer une convention avec le fonds de garantie.

 

Sources : décret n°2021-1912 du 30 décembre 2021

Déclaration de sinistre à l’assurance dommages ouvrages

L’assureur est tenu de répondre dans un délai de soixante jours quelles que soient les déclarations précédentes

Déclaration de sinistre à l’assurance dommage ouvrage : l’assureur est tenu de répondre dans un délai de soixante jours quelles que soient les déclarations précédentes
Lorsqu’un assureur dommage ouvrage est saisi d’une déclaration de sinistre pour des désordres sur une construction immobilière, le Code des assurances lui impose de répondre dans un délai de soixante jours après la déclaration du sinistre. Les tribunaux ont été saisis de la question du respect de ce délai lorsque l’assureur avait déjà été saisi pour un sinistre identique et avait traité la déclaration dans les temps.
Dans cette affaire, un couple a fait construire une maison par un constructeur.

Après avoir constaté plusieurs malfaçons, le couple saisit l’assurance dommages-ouvrage en 2009 d’une première déclaration de sinistre à laquelle l’assureur répondra dans le délai de soixante jours. En 2012, le couple saisit une nouvelle fois l’assureur pour les mêmes désordres.

L’assureur ne répond pas dans le délai et refusera par la suite de prendre en charge le sinistre. L’assureur oppose au couple la déclaration tardive du sinistre puisqu’elle a été introduite au-delà du délai de prescription de deux ans prévus en matière d’assurance. Le couple saisit les tribunaux pour faire valoir ses droits. Le Code des assurances prévoit en effet que l’assureur dommages-ouvrage ne peut plus invoquer le délai de prescription de deux ans lorsqu’il n’a pas répondu à une déclaration de sinistre dans le délai de soixante jours. L’assureur conteste cette position puisque le sinistre déclaré en 2012 était identique à celui déclaré en 2009 et avait donc déjà été traité.
La Cour de cassation tranche ici en faveur du couple. Elle confirme que l’assureur dommages-ouvrage est tenu de répondre dans le délai de soixante jours à toute déclaration de sinistre sans distinguer si le sinistre avait déjà été traité ou non lors d’une déclaration précédente.

 

Sources : Cass. civ3, 30 sept. 2021, n° 20-18.883

Droit du travail et messagerie instantanées : que dit la loi ?

Messageries instantanées professionnelles : les propos qui y sont tenus peuvent justifier un licenciement

 

Dans cette affaire, un salarié a été licencié pour les propos insultants et dégradants qu’il tenait régulièrement envers sa hiérarchie et ses collègues, ainsi que pour ses nombreuses critiques sur l’organisation, la stratégie et les méthodes de l’entreprise.

 

La spécificité de cette affaire tient au fait que les propos litigieux ont été tenus sur la messagerie instantanée professionnelle de l’entreprise par le salarié. Or, la messagerie instantanée du salarié était reliée à la boite mail professionnelle de son assistante, avec l’accord de ce dernier. L’assistante recevait automatiquement la copie des conversations sur sa boite mail.

 

Cette dernière en a informé l’employeur, lequel a pu consulter les messages et a licencié le salarié pour manquement à son obligation de loyauté. Le salarié conteste son licenciement en s’appuyant sur le principe du droit au respect de la vie privée des salariés même sur leur temps et leur lieu de travail. Il invoque le contenu privé des propos et considère que l’employeur ne pouvait librement les consulter. Il estime donc que les preuves recueillies l’ont été de façon illicite et conteste leur utilisation dans le cadre de son licenciement.

 

Les juges n’ont pas donné raison au salarié. Ils rappellent tout d’abord que d’après une jurisprudence bien établie, les mails adressés ou reçus par le salarié sur sa messagerie professionnelle sont présumés avoir un caractère professionnel. Ils peuvent donc être librement consultés par l’employeur même en l’absence de l’intéressé, sauf si ce dernier les a identifiés de façon explicite comme ayant un caractère personnel. Dans cette affaire, les juges ont constaté que les propos tenus par le salarié avaient bien un lien avec l’activité professionnelle car il était mentionné, outre des propos insultants, des critiques sur les stratégies et sur l’organisation de l’entreprise.

 

Ils ont ensuite constaté que les messages transférés sur la boite mail de l’assistante, même provenant d’une conversation sur messagerie instantanée, n’avaient pas été identifiés comme ayant un caractère personnel par le salarié. Selon les juges, il en résulte donc que l’employeur pouvait en prendre librement connaissance et les invoquer à l’appui du licenciement.

 

Cette décision rappelle que les salariés peuvent être licenciés pour des propos tenus sur une messagerie instantanée et qu’ils doivent s’informer sur le cheminement informatique de la conversation.

 

 

Source : Cass. soc., 9 septembre 2020 n°18-20.489

Assureurs et COVID-19 : communiqué de presse

Engagements des assureurs pour participer à l’effort national de mobilisation face à la crise du Covid-19

  

Le Premier ministre Edouard Philippe s’est entretenu à plusieurs reprises avec les représentants du secteur des assurances, en lien avec le ministre de l’Economie et des Finances, pour leur demander de prendre des engagements ambitieux contribuant à l’effort national de mobilisation face à la crise du Covid-19.

 

En réponse à ces demandes, les assureurs ont pris, en complément des mesures déjà annoncées le 23 mars dernier, de nouveaux engagements, afin de soutenir en particulier les publics les plus affectés par la crise du coronavirus (personnels soignants, publics vulnérables, petites entreprises et indépendants).

Les assureurs se sont ainsi engagés à :

 

  • accroître leur contribution au fonds de solidarité mis en place par le Gouvernement pour soutenir les entreprises confrontées à une baisse significative de leur activité, portant la contribution totale du secteur des assurances à 400 millions d’euros ;

 

  • mettre en œuvre des gestes commerciaux à l’attention de leurs assurés, en particulier les plus exposés à la crise, pour les accompagner dans la période exceptionnelle actuelle, pour un montant estimé globalement par les assureurs à 1,35 milliard d’euros. Ces gestes commerciaux, propres à chaque assureur, prendront la forme par exemple de réductions tarifaires, d’extension de garanties d’assurances ; ils concerneront les petites entreprises et les indépendants (450 M€), les personnes particulièrement exposées au Covid-19 (550 M€), les personnels soignants (150 M€) et l’ensemble des ménages (200 M€) ;

 

  • mobiliser leurs capacités d’investissement afin de soutenir la relance de l’économie française à travers un programme d’investissement de 1,5 milliard d’euros : les assureurs vont investir dans des fonds de place, pour apporter des financements en fonds propres aux PME et aux ETI, afin de soutenir la reprise économique et le redémarrage de l’investissement. Des fonds d’investissement dans le secteur de la santé au sens large (développements de capacité de production en France/Europe en matière pharmaceutique et de matériel médical, financement de start-ups biotechnologiques) seront également mis en place ;

 

  • travailler, dans le cadre d’un groupe de travail animé par le ministère de l’Economie et des Finances, à la mise en place d’un régime d’assurance des pandémies. Ce groupe de travail remettra de premières recommandations avant la fin du mois de

Le Premier ministre a demandé au ministre de l’Economie et des Finances, en lien avec la Fédération Française de l’Assurance, de veiller à la bonne mise en œuvre de ces engagements dans les meilleurs délais.

 

 

 

Source: Communiqué de presse du Premier Ministre du 15 Avril 2020

Lettre d’informations : Point technique sur le COVID-19

POINT TECHNIQUE

COVID 19 : LA GARANTIE PERTE D’EXPLOITATION

Les garanties « Pertes d’Exploitation » et « Frais Supplémentaires » ont vocation à indemniser l’Assuré des préjudices financiers consécutifs à la survenance dans les locaux assurés, d’un dommage matériel tel que défini et garanti au titre de la police d’assurance.

Aussi, les pertes d’Exploitation consécutives à la survenance d’une épidémie ou d’une pandémie ne sont pas couvertes, et aujourd’hui aucune solution assurantielle n’existe sur le marché. En ce qui concerne la garantie optionnelle « Pertes d’Exploitation suite à impossibilité d’accès », elle ne pourra pas être mobilisée si l’impossibilité d’accès intervient après une décision des autorités motivée par la survenance d’une épidémie ou une pandémie

Au regard de la situation exceptionnelle que traverse notre Pays, les Pouvoirs Publics engagent une réflexion avec les différents Assureurs, afin de déterminer comment ces derniers pourraient participer à l’effort de solidarité nationale, nous vous tiendrons informé d’éventuels développements. »

 

LU DANS LA PRESSE

M. Bruno LE MAIRE, Ministre de l’Economie et des Finances (le 17/03/2020)

« Les catastrophes naturelles sont prises en charge, mais pas les catastrophes sanitaires »

 

Fédération Française du Bâtiment

« Les contrats d’assurance couvrant les pertes d’exploitation interviennent en cas de dommages garantis par le contrat. On peut citer l’incendie de l’atelier de l’entreprise ou un événement climatique touchant les locaux. En l’occurrence, le coronavirus n’est pas un dommage garanti par les contrats des entreprises du secteur, aussi, ses conséquences sur l’activité de l’entreprise ne sont, en l’état des informations dont nous disposons à de jour, pas couvertes »

 

Geoffroy ROUX de BEZIEUX, Président du MEDEF (OUEST France le 17/03/2020)

 Question : Les compagnies d’assurances ne prévoient pas de clauses liées à une crise sanitaire. Qui va payer ?

 

Réponse : Les assurances sont là pour mutualiser un aléa, c’est-à-dire un risque non prévisible. Nous sommes dans quelque chose de très différent avec une mesure généralisée par l’État. Ce n’est pas un incendie ou une tornade. Avec une assurance, on mutualise. Il faut que des gens se portent bien pour pouvoir supporter les sinistres de ceux qui vont mal. En ce moment, c’est un peu comme si tout le monde avait un accident de voiture en même temps. Là, c’est à l’État d’assumer les conséquences des mesures sanitaires qu’il a prises.

 

FFA (Fédération Française de l’Assurance) le 23/03/2020

 

Dans le prolongement des mesures d’urgence annoncées la semaine dernière, et de celles mises en place individuellement par ses membres, la FFA a présenté ce matin à Monsieur Bruno Le Maire, Ministre de l’Economie et des Finances, de nouvelles mesures de solidarité.

Les membres de la FFA s’engagent à contribuer à hauteur de 200 millions d’euros au Fonds de solidarité mis en place par les pouvoirs publics en faveur des TPE et des indépendants, des secteurs particulièrement touchés par les conséquences économiques, financières et sociales du virus covid-19.

 

 

RAMBAUD LABROSSE – 26 mars 2020 – Les informations communiquées en l’espèce ne prétendent aucunement à l’exhaustivité, elles ont un caractère purement informatif et ne sont données qu’à titre indicatif, elles ne sauraient engager une quelconque responsabilité du cabinet Rambaud Labrosse.

COVID 19: Quid du paiement des loyers par les entreprises ?

En période de confinement, et alors que de nombreux commerces sont désormais fermés, les locataires commerciaux pourront-ils invoquer la force majeure ou l’imprévision pour cesser de payer leurs loyers ? Me Philippe Julien fait un point sur la question.

Le Président de la République a annoncé lundi soir, parmi les mesures visant à protéger les PME, la « suspension des factures d’eau, de gaz ou d’électricité ainsi que des loyers.» Dans l’attente de connaître précisément les contours de cette mesure concernant le paiement des loyers commerciaux en période de confinement, et alors que certains bailleurs institutionnels annoncent eux-mêmes des mesures de suspension en faveur des commerces de proximité, voici en urgence quelques réflexions juridiques sur le sujet.

 

Le ministre de l’économie et des finances, Bruno Le Maire, a récemment annoncé que l’épidémie de coronavirus devait être considérée comme « un cas de force majeure pour les entreprises, salariés et employeurs ». Cette déclaration, limitée aux « marchés publics de l’État », n’a évidemment pas pour effet de transformer l’épidémie de coronavirus en évènement de force majeure justifiant l’inexécution de toutes les obligations contractuelles de droit privé.

 

Revenons aux sources de l’article 1218 du Code civil, qui dispose que :

« Il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu’un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités pas des mesures appropriées, empêche l’exécution de son obligation par le débiteur.

Si l’empêchement est temporaire, l’exécution de l’obligation est suspendue à moins que le retard qui en résulterait ne justifie la résolution du contrat. Si l’empêchement est définitif, le contrat est résolu de plein droit et les parties sont libérées de leurs obligations dans les conditions prévues aux articles 1351 et 1351-1 ».

 

En vertu de ce texte, la force majeure est caractérisée lorsque l’événement survenu était imprévisible, irrésistible et extérieur.

La condition d’extériorité n’est pas en débat dans la mesure où le débiteur n’est pas à l’origine de l’épidémie. La condition d’imprévisibilité ne semble pas non plus présenter de difficulté particulière : dès lors que la conclusion du contrat est antérieure à la survenance de l’épidémie, les parties ne pouvaient la prévoir, en tout cas pas dans ses effets actuels.

C’est davantage le critère d’irrésistibilité qui pose question. L’article 1218 du Code civil précise que la force majeure est l’événement « dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées » et qui « empêche l’exécution de son obligation par le débiteur ». Pour vérifier si cette condition est validée, deux situations sont à distinguer.

 

La première hypothèse est celle dans laquelle un arrêté a interdit l’ouverture d’un local commercial exploité en vertu d’un bail en raison de sa destination. Dans un tel cas, le bailleur n’est plus en mesure de satisfaire à son obligation de délivrance (Cass. 3e civ. 7-3-2006 n°04-19.639) en raison d’un évènement de force majeure qui aura pour effet de suspendre l’exécution du contrat par les parties.

On peut ajouter en toute hypothèse qu’en présence d’une privation totale de jouissance non imputable au preneur, ce dernier pourra faire valoir l’exception d’inexécution de l’article 1220 du Code civil, suivant lequel une « partie peut suspendre l’exécution de son obligation dès lors qu’il est manifeste que son cocontractant ne s’exécutera pas à l’échéance et que les conséquences de cette inexécution sont suffisamment graves pour elle », cette suspension devant « être notifiée dans les meilleurs délais ». Le locataire devra ainsi notifier au bailleur qu’il ne paiera pas les loyers pendant la période d’interdiction d’activité.

En conséquence, les entreprises dont l’activité économique est consubstantiellement attachée à l’exploitation de leur local commercial (tout le commerce de détail notamment) peuvent, sans prendre de risque inconsidéré selon nous, suspendre le paiement de leurs loyers à compter du 2e trimestre 2020 (que le loyer soit payable à terme échu ou à échoir) en invoquant la survenance d’un évènement de force majeure et l’exception d’inexécution de l’article 1220 du Code civil. Il est fortement recommandé de notifier cette suspension au bailleur et de se conformer, plus généralement, au processus décrit dans le bail, le cas échéant, en cas de force majeure.

 

La seconde hypothèse est la suivante : en raison d’une baisse de son chiffre d’affaires due à la survenance de l’épidémie de coronavirus, le preneur à bail commercial ne peut plus assurer le paiement des loyers. Cette situation est plus délicate pour le preneur puisque, d’une part, le bailleur respecte bien son obligation de délivrance et, d’autre part, en vertu de l’adage « genera non pereunt » (les choses de genre ne périssent pas), les juges peinent à admettre la force majeure pour justifier l’inexécution d’une obligation monétaire. À ce titre, la Cour de cassation a notamment jugé que « le débiteur d’une obligation contractuelle de somme d’argent inexécutée ne peut s’exonérer de cette obligation en invoquant un cas de force majeure » (Cass. com. 16-9-2014 n°13-20.306 F-PB : RJDA 11/14 n° 886).

Cette position jurisprudentielle s’explique par le fait que l’argent, qui est une chose fongible, peut toujours être remplacé, de sorte qu’il ne serait pas impossible pour le preneur à bail de payer ses loyers. Ainsi, dès lors qu’il n’est pas impossible pour le débiteur d’exécuter son obligation, mais que cette exécution est seulement rendue plus difficile par les circonstances, la force majeure ne peut être retenue (Cass. com. 31-5-1976, n°75-14.625 : Bull. civ. IV n° 186). Au contraire, lorsque le débiteur parvient à prouver que l’exécution de l’obligation était rendue impossible en raison de la survenance d’une épidémie, le critère d’irrésistibilité serait caractérisé et la force majeure retenue (CA Paris 17-3-2016 n°15/04263 : « Le caractère avéré de l’épidémie qui a frappé l’Afrique de l’Ouest à partir du mois de décembre 2013, même à la considérer comme un cas de force majeure, ne suffit pas à établir ipso facto que la baisse ou l’absence de trésorerie invoquées par la société appelante lui serait imputable, faute d’éléments comptables »).

Il a notamment été jugé qu’un défaut de paiement était justifié par la survenance d’une épidémie qui a eu des conséquences irrésistibles pour l’exploitation d’un débiteur (CA Bourges 21-5-2010 n°09/01290).

En conséquence, le preneur à bail pourrait être déchargé de son obligation de payer les loyers si ce paiement a été rendu impossible par la survenance de l’épidémie de coronavirus. Au contraire, lorsque l’exécution de son obligation est seulement plus difficile, il ne pourra pas bénéficier de la force majeure et devra solliciter la mise en œuvre d’autres mécanismes.

 

Pour les entreprises se trouvant dans une situation de disparition drastique de chiffre d’affaires, il est donc recommandé de notifier à leur bailleur la suspension des loyers sur le fondement de la force majeure, dans le respect du processus décrit, le cas échéant, au bail, en documentant sérieusement sur le plan comptable et financier l’impossibilité (et pas seulement la difficulté) de régler le loyer pendant la période de confinement. Il est recommandé, en cas de réception d’un commandement de payer visant la clause résolutoire adressé par le bailleur – mais cela paraît improbable car les huissiers ne délivrent désormais les actes qu’au compte-gouttes – de saisir le juge des référés pour obtenir au minimum et en urgence le report de l’exigibilité du deuxième trimestre 2020 au visa de l’article 1343-5 du Code civil. Rappelons-le en effet, le juge peut non seulement échelonner une dette au visa de cet article mais également la reporter, dans la limite de 24 mois.

 

Autre piste, l’article 1195 du Code civil prévoit que les parties peuvent renégocier leur contrat lorsqu’un changement de circonstances imprévisible lors de la conclusion du contrat rend l’exécution excessivement onéreuse pour une partie. En cas d’échec dans la renégociation, les parties peuvent décider de résoudre le contrat ou de soumettre ce contrat au juge, qui procédera à son adaptation. Cette disposition pourrait parfaitement s’appliquer à l’épidémie de coronavirus mais cela suppose que le bail ait été conclu ou renouvelé postérieurement à l’entrée en vigueur de ce texte, soit à compter du 1er octobre 2016. Par ailleurs, tant que le juge ne s’est pas prononcé, les parties sont tenues d’appliquer le contrat dans toutes ses dispositions. L’article 1195 du Code civil rappelle en effet que chacune des parties « continue à exécuter ses obligations durant la renégociation ». Les tribunaux étant eux-mêmes fermés (ou presque) en raison du coronavirus, il n’est pas certain que le recours au juge au visa de l’article 1195 constitue la mesure la plus appropriée à ce stade.